Homélie du jour de Pâques- 4 avril 2021

Frères et sœurs

Comme nous sommes heureux d’être rassemblés en communauté pour célébrer depuis dimanche dernier les mystères de notre foi : ce ne sont pas des rites usés que l’on pourrait remplacer en s’enfermant dans sa chambre pour y prier seul son Dieu…, même si nous devons suivre les conseils du Christ donné dans le sermon sur la montagne (cf. Mt 6,6) : « Toi quand tu veux prier va dans ta chambre et là prie ton Père qui voit dans le secret… » Et dis : « Notre Père. » (cf. Mt 6,9) Même lorsque tu es seul en disant cette prière enseignée par Jésus il faut pourtant que tu saches que tu es relié non seulement à Dieu le Père mais aussi à tous tes frères et sœurs de par le monde puisque tu dis : « Notre Père… » .

Nous sommes des êtres de relation. C’est ce qui caractérise fondamentalement l’être humain : son corps, son intelligence, son désir, la vie qu’il a reçue de ses parents : tout le conduit à entrer en relation avec les autres et avec l’Autre qu’est le Seigneur notre Dieu puisqu’Il est la source de notre vie.

L’Eglise avant d’être un bâtiment si beau soit-il est une communauté humaine, la communauté des frères et sœurs de Jésus Christ, le frère aîné. C’est dans cette communauté humaine bigarrée qu’aujourd’hui les nouveaux baptisés entrent. S’ils y entrent c’est parce que leur désir d’y entrer a été entendu et accueilli, qu’ils ont été accompagnés par d’autres frères et qu’ils vont pouvoir comme le dit l’Evangile y aller et venir sous la conduite du Christ pasteur (cf. Jn 10,9) doux et humble de cœur (cf. Mt 11,29) qui leur exprime la tendresse de Dieu notre Père.
Les petits enfants qui sont baptisés ce matin aussi le sont parce que leurs parents le veulent –et ils en ont bien le droit- puisqu’ils doivent éducation, attention, soins et amour à leur enfant. Et pourquoi ne le leur exprimeraient-ils pas par le baptême qu’eux-mêmes ont reçu et qui les guide pour ne pas tomber dans l’idolâtrie, la sauvagerie, la méchanceté mais au contraire pour refléter la beauté, la prévenance, la joie pure du Christ également tourné vers son Père et son prochain.

Au cœur de la liturgie baptismale et après avoir entendu la Parole biblique qui sans cesse et avec réalisme nous appelle à quitter ce qui ne peut que vieillir et se calcifier en nous qu’allons-nous faire nous tous ici présents ?

Nous allons une fois encore comme à chaque Pâques dire devant Dieu après certainement l’avoir redit dans le fond de notre être : Oui, Seigneur nous renonçons à l’esprit du mal, à Satan le diviseur du monde, celui qui veut nous posséder, le malin. Un jour un policier sans doute un peu désabusé m’a dit : mais comment voulez-vous que je dise cela puisque je sais que je transgresserai moi aussi comme les autres les lois et qu’il m’arrivera encore de faire le mal ? Je lui ai répondu : Raison de plus pour le dire : Oui, Seigneur je renonce, oui Seigneur nous renonçons dans la force de l’Esprit Saint qui est bien plus fort que l’esprit malin. Je veux m’en imprégner. Je veux y croire.

Voilà pourquoi dans un deuxième temps nous déclarons à Dieu ensemble et proches les uns des autres et en disant non pas « nous » mais « Je » ces mots qui résonnent depuis des siècles dans nos églises à Pâques et lors des baptêmes : JE CROIS !
Ainsi dans un laps de temps ultra rapide nous faisons nôtres le mystère pascal qui n’est pas une énigme mais le chemin proposé par notre Dieu : passer des ténèbres à la lumière, sortir de la noyade pour respirer à plein poumon, quitter les rives du péchés pour accueillir la grâce de Dieu, entrer dans la dynamique de la résurrection en passant de la mort à la vie en plénitude qui dès maintenant fait de nous des êtres ressuscités. Car, frères et sœurs par le baptême de l’eau et de l’Esprit Saint nous sommes passés de la mort à la vie. Nous ne sommes pas des condamnés au confinement mortifère mais des êtres libérés. Combien de saints, de persécutés, de malades et de mourants comme Sainte Thérèse de Lisieux qui disait proche de sa mort terrestre : « J’entre dans la vie ! » ont fait avant nous cette expérience de la foi au Christ qui nous ouvre sans tarder le monde nouveau.

Au petit matin de Pâques les femmes venues au tombeau du Christ venaient se recueillir devant leur maître mort et après avoir dépassé la peur en voyant le tombeau qu’elles croyaient violé elles ont été saisies par la nouvelle pascale : Il n’est pas ici. L’horreur n’a pas eu le dernier mot. Le juste n’est pas maudit. La vie malgré tout a pris le pas sur les enfers. Depuis elles ont porté cette nouvelle tremblantes et joyeuses et les apôtres colonnes de l’Eglise- pourtant bien ébranlées durant la Passion- ont accueilli et authentifié cette nouvelle qui a fait le tour de la terre mais qui doit faire de génération en génération le tour des cœurs…, de nos cœurs.
Peut-être que dans cette église ce matin certains ont du mal à croire ! Pourquoi en serait-il autrement ? Je vous propose frères et sœurs pendant quelques instants de laisser monter en vous vos objections, vos peines, vos deuils, vos craintes, vos doutes… qui sont croyez-le aussi les miens… Je vous propose également d’accueillir la nouvelle pascale qui bouleverse cette paralysie qui nous étreint. Parce que nous espérons secrètement au fond de nous être libérés, être ouverts aux horizons que Dieu veut à chaque génération pour l’humanité et que les prophéties de la Bible espéraient déjà : une terre sans cesse renouvelée non par l’astuce des hommes mais par la grâce de Dieu, des cœurs ouverts d’où sortent des fleuves d’eau vive comme le cœur, le Sacré-Cœur du Christ d’où jaillissent l’eau du baptême et le sang qui est l’âme du Christ image de l’eucharistie pour notre régénération.

Pensons à tout cela tout à l’heure en accompagnant nos frères et sœurs baptisés et en recueillant quelques gouttes symboliques de l’eau baptismale sur nous-mêmes. Pensons à cela en communiant de tout notre être au Christ notre frère et notre Dieu qui veut remplir nos personnes de sa présence divine. Alors nous ressortirons forts de la force de Dieu et nous ne serons plus confinés intérieurement car le confinement intérieur est pire que le confinement sanitaire.

Nous chanterons avec la multitude des saints, des anges et des baptisés-confirmés de ce jour : Alléluia, vive Dieu qui fait toutes choses nouvelles jusqu’à la fin du monde !
ALLELUIA, CHRIST LOUANGE A TOI !

Père Stéphane AULARD