HOMELIE POUR LA FETE DE LA TOUSSAINT

ND de Vincennes – 1er Novembre 2017

Frères et sœurs,

comment fêter aujourd’hui encore la Toussaint à l’heure des héros  de toutes sortes que nous présentent les jeux vidéo, les sportifs ou les idoles du spectacle à force d’effets spéciaux et de technologies toujours plus sophistiquées quand il ne s’agit pas de dopage ?

Ou alors les saints seraient-ils réduits à être des gens tellement bizarres

qu’ils en deviendraient aussi inquiétants que ces « loups solitaires » qui commettent des attentats terroristes ?

La sainteté serait-elle donc surannée, indescriptible, vraiment hors de notre contexte ?

Il me semble évidemment que non, cela ne vous étonnera pas !

1-Le sermon sur la Montagne (Matthieu 5,1-12)

Chaque année, l’Evangile du jour de la Toussaint nous donne d’entendre le début du fameux sermon sur la montagne que Jésus donna à ses disciples les plus proches.

Et nous sommes ici ce matin autour de Jésus le Seigneur pour entendre, comme les disciples, les béatitudes qui inaugurent ce discours du Seigneur. On les a souvent qualifiées de charte du bonheur ou du Royaume parce

que le mot « heureux » y est employé neuf fois

et que ce mot si courant résonne immédiatement aux oreilles de n’importe quel être vivant sur terre. Qui ne veut pas être heureux ? Précisons d’emblée que le Christ ne nous interpelle pas chacun en nous donnant personnellement une sorte de recette du bonheur du genre :

« Si tu veux être heureux va te plonger dans le dernier Spa qui vient d’ouvrir deux rues plus loin »

Ou encore : « Si tu veux être heureux achète tel ou tel objet technologique qui te facilitera tellement la vie que … tu ne pourras plus t’en passer ! »

Le Seigneur s’adresse à tous ses disciples et Il parle au pluriel :

  • « Heureux les pauvres de cœur car le Royaume des cieux est à eux ! »
  • « Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage »

Ces béatitudes au pluriel nous disent déjà que l‘on ne fait pas son bonheur tout seul et qu’il s’agit moins de donner une recette du bonheur que de constater combien dans ce monde et dans notre Eglise les pauvres de cœur, les doux, les artisans de paix, les cœurs purs sont heureux !

C’est le Seigneur lui-même qui nous dit : Vous êtes heureux, bienheureux d’avoir choisi ma voie de sainteté pour vivre du bonheur de Dieu, de la vie dans l’Esprit.

Dans l’éditorial de ce jour, je précise ceci : l’appel à la sainteté vient de très loin dans la Bible, précisément du livre du Lévitique :

« Soyez saints, dit le Seigneur car Moi le Seigneur votre Dieu, Je suis saint ! » (Lévitique 19,1).

Le sermon sur la montagne déploie les voies de la sainteté lorsqu’il nous dit : « Tu rêves de paix (qui n’en rêve pas ?), alors ne fais pas de vastes considérations sur le thème ou ne défile pas d’abord avec des pacifistes, mais vis en paix avec tes voisins, ta famille, surveille ta langue de vipère, réconcilie-toi. »

  • « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu ! »

Tu trouves que le corps de l’être humain s’étale partout avec indécence et qu’il y a trop de pornographie partout, ne rêve pas de censure mais commence par avoir un regard chaste sur les autres qui ne sont pas de la marchandise à consommer : hommes et femmes respectons-nous !

  • « Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu ! »

2-Oui, frères et sœurs la sainteté est un appel à la mobilisation générale

car la foi chrétienne nous y appelle. La Toussaint expose sous nos yeux un peu comme les statues et les reliquaires dans nos églises

les frères et sœurs aînés qui déploient la grande fresque de l’histoire chrétienne à partir du seul Saint Jésus Christ, de Saint Joseph et de la Vierge Marie

jusqu’aux saints dont le procès de béatification puis de canonisation est en cours.

Il en va ainsi de Madeleine Delbrêl,

assistante sociale dans les quartiers d’Ivry morte en odeur de sainteté à l’âge de 60 ans en 1964 après une vie de service des autres.

La tradition chrétienne veut que l’on donne un prénom chrétien à ses enfants et c’est ce prénom qui est prononcé lorsque l’enfant ou l’adulte reçoit le baptême. Une autre belle tradition veut que l’on donne plusieurs prénoms : souvent ce sont ceux des grands-parents, d’un oncle ou d’une tante, d’un saint que l’on aime particulièrement.

Recherchons peut-être en cette période pourquoi ces prénoms m‘ont-ils été donnés et à quel saint ils renvoient. Si je porte le prénom d’un saint ou d’une sainte, je suis invité à poursuivre son histoire de sainteté, de don, d’annonce de la foi, de charité.

3-La Toussaint enfin, c’est la fête audacieuse de tous les disciples du Christ

comme ces chrétiens auxquels le grand Saint Paul s’adressait en les appelant systématiquement au début de ses lettres : Vous les saints qui êtes à Rome, Corinthe, Ephèse ou Philippe…

C’est bien la fête de la famille chrétienne qui se réjouit comme dit l’Apocalypse (Apocalypse 7,14) de savoir

qu’une multitude en marche de baptisés vêtus de la robe blanche du baptême et les palmes du martyre  à la main sont déjà dans le Seigneur.

C’est heureux ! C’est stimulant ! C’est proposé à tous comme un chemin d’humanité joyeux, fort et consistant.

Regardons encore les images des saints dans nos églises et sur les vitraux. Ils nous invitent à voir grand et à voir haut à la suite de Jésus Christ.

Soyons heureux d’être chrétiens !

Soyons heureux d’appartenir à cette multitude et n’hésitons pas à en témoigner simplement, assurément !

 

Père Stéphane AULARD