HOMÉLIE POUR LA MESSE DES RAMEAUX ET DE LA PASSION DU SEIGNEUR (Notre-Dame de Vincennes – 5 avril 2020)

HOMÉLIE POUR LA MESSE DES RAMEAUX ET DE LA PASSION DU SEIGNEUR
(Notre-Dame de Vincennes – 5 avril 2020)

Frères et sœurs, nous commençons avec cette messe des Rameaux et de la Passion du Seigneur la Semaine Sainte.
Avons-nous la tête à célébrer notre Dieu en ce moment si particulier de pandémie qui affecte des millions de gens partout dans le monde ?
Les témoignages d’amitié, les demandes de prière, les nouveaux moyens de communication qui s’agitent dans l’Eglise- comme partout ailleurs- semblent être un bon indicateur de notre désir d’y voir un peu plus clair, de recherche de sens au travers de cette épreuve que nous subissons tous, de notre demande plus ou moins explicite adressée au Seigneur :
 « Nous T’en prions Seigneur fais cesser tout cela par ta main puissante ; celle qui jadis ouvrit la mer au peuple hébreu que Tu libéras d’Egypte. »
 « Nous T’en prions, Seigneur, aide-nous à tenir dans cette situation qui nous sidère, qui nous atteint alors que nous pensions être définitivement à l’abri des grandes épidémies que connurent il y a si longtemps nos ancêtres. »
 « Nous T’en prions, Seigneur, si cette épreuve a un sens, mets devant nos yeux les leçons que nous avons à tirer de tout ce bouleversement ; renouvelle notre humanité afin qu’elle ressemble davantage à ce que Tu espères d’elle à la suite de ton Fils compatissant, miséricordieux, pleinement engagé dans son combat contre le mal, la souffrance et le péché du monde. »
Nous venons de rappeler dans cette liturgie des rameaux l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem. Habituellement c’est au milieu de nos frères et sœurs –vous- que nous revivons cette entrée du Seigneur dans la ville sainte qui quelques jours après voudra l’éliminer Lui l’innocent, le compatissant, le cœur pur par excellence !
D’ordinaire, nous tenons à la main des rameaux de buis, d’olivier, de laurier : ils sont bénis avec l’eau puissant symbole qui rappelle notre baptême. Nous recevons quelques gouttelettes de cette eau qui nous communique non une contagion mais bien le désir de Dieu que sa créature soit renouvelée par la puissance de la Passion et de la Résurrection du Christ. Car, frères et sœurs ne nous y trompons pas, même si la liturgie de cette Semaine Sainte va nous faire suivre les grandes étapes de l’ultime semaine du Christ au milieu de son peuple, nous n’allons pas revenir à Jérusalem en l’an 33 de notre ère. Nous sommes en 2020 après Jésus Christ en pleine pandémie et nous annonçons fidèlement, fermement, totalement que le Christ a traversé la mort ignoble qu’on a voulu Lui infliger. Il l’a fait une fois pour toutes et rien, pas même une pandémie, ne nous fera dévier de cela : Jésus Christ nous a inoculé le vaccin qui a permis à tous ceux qui nous ont précédés et qui ont traversé en d’autres époques de terribles tourments – famines, épidémie, guerres – de toujours se relever. Ce vaccin irrésistible, quel est-il ? C’est celui de la dignité alors que l’on est bafoué, c’est celui de la grandeur alors que l’on vous marche dessus, c’est celui de la libre parole alors que l’on veut vous faire taire, c’est celui de la prière alors que tout semble indiquer que Dieu n’est plus là et qu’il abandonne sa créature. Tout cela le Christ nous l’a appris et ces rameaux que vous avez peut-être fabriqués en famille avec du papier, de la colle et des ciseaux, ces rameaux que vous avez peut-être empruntés à un arbre parce que vous habitez à côté du Bois de Vincennes, ils reçoivent aujourd’hui cette bénédiction du Seigneur. Si nous allons faire mémoire cette année encore de la Passion du Seigneur c’est parce qu’à son école nous savons que nous avons beaucoup à apprendre pour atteindre avec sa grâce cette dignité des enfants de Dieu, cette grandeur humaine qui vient de Dieu assurément, cette capacité de réfléchir et de méditer à la lumière de la Parole divine, cette possibilité de surmonter nos peurs et notre vide en osant prier Celui qui ne cessera jamais de nous attirer car Il est notre frère aîné, car Il est notre Dieu qui nous entraîne à devenir des fils et des filles de Dieu, car il est notre Seigneur et notre Dieu.
Voilà ce que je voulais vous dire chers amis, chers paroissiens de Vincennes ou de tout à fait ailleurs alors que nous entrons dans cette semaine bénie de manière si particulière cette année. Retournons la situation et vivons intensément seuls, en famille, la Passion, la mort et la Résurrection du Christ en osant faire un pas dans notre foi !
Je conclus avec une prière que je vous partage, ma prière :
 Seigneur Jésus, envoyé de Dieu notre Père, Fils éternel, tu n’as pas fait prévaloir tes justes titres de gloire en parcourant notre terre, en te mêlant aux humbles qui savent tenir leur cœur ouvert.
 Seigneur Jésus, viens je t’ouvre mon cœur pour m’imprégner de ton être car lorsque le frère en humanité vient jusqu’à moi c’est aussi le Fils éternel du Dieu vivant qui s’approche.
 Seigneur Jésus en cette période où nous ne pouvons plus nous étreindre, nous toucher, Tu fais mieux que cela car par la force de l’Esprit Saint qui a fait naître ton Eglise au milieu de l’humanité tu nous rejoins. Tu nous dis notre identité véritable qui ne saurait nous être enlevée : nous sommes et nous serons des fils et des filles de Dieu en Jésus Christ quel que soit notre état, notre condition et pour reprendre les paroles du grand Saint Paul :
 « Ni la mort ni la vie, ni présent ni avenir, rien ne nous séparera de l’amour du Christ ! » (cf. Romains 8,38-39)

Père Stéphane AULARD