Commémoration de l’armistice du 11 novembre 1918

Et la journée du souvenir des morts des guerres

(Notre-Dame de Vincennes – 11 novembre 2017)

1-Frères et sœurs pendant des siècles en France comme en Allemagne et en de nombreux pays d’Europe

on a célébré le grand Saint Martin le 11 novembre

puisque c’est le jour de sa fête liturgique depuis toujours !

Depuis le 11 novembre 1918 cette fête est un peu passée « à la trappe » puisque précisément ce jour-là l’Armistice advint au terme de ce que l’on appela la Première Guerre mondiale qui dura, comme vous le savez, quatre ans.

Saint Martin était un soldat d’origine hongroise au 4ème siècle. Son père était déjà militaire et il fut enrôlé très jeune dans la garde impériale romaine à cheval, ce qui le conduisit en Gaule. Nous avons tous en mémoire l’épisode fameux au cours duquel il coupa la moitié de son manteau pour la donner à un pauvre.

La mémoire de ce soldat fêté le 11 novembre est restée vive dans notre culture : de nombreux villages et jusqu’à un patronyme portent le nom de ce saint ! En ce jour où l’on fait aussi mémoire des nombreux soldats qui se battirent au siècle dernier n’est-il pas juste non de les canoniser mais de faire mémoire de leurs actes valeureux tant il est vrai que l’être humain se révèle souvent extraordinaire au cœur de situations extrêmes. Beaucoup connurent la faim, le froid, la peur au ventre dans les tranchées, au Chemin des Dames où se déroula une bataille terrible entre Français et Allemands entre avril et octobre 1917 et qui se solda par plusieurs centaines de milliers de morts notamment des tirailleurs sénégalais.

Dans cette eucharistie, faisons mémoire de ces hommes, de leur sacrifice pour la France : beaucoup d’entre nous ont parmi leurs ancêtres de ces soldats : certains étaient sans doute originaires de Vincennes.

2-Les lectures bibliques choisies pour cette messe demandée par le Souvenir français sont celles de la Saint Martin : elles ont sans doute de quoi nous éclairer pour aujourd’hui et pour demain (l’an prochain ce sera le centenaire de cette Armistice).

Isaïe (Is 61,1-3) :

ce texte célèbre annonce l’ère messianique où la bonne nouvelle d’un salut passant par la guérison, la libération la consolation des endeuillés non seulement advient, mais est aussi durable.

Pour les disciples de Jésus, cela est précisément advenu depuis qu’Il est venu à notre rencontre il y a 2000 ans.

C’est pourtant dans le sang et les larmes, alors que le péché de l’homme et la violence sans nom dont il se montre toujours capable que cette paix perpétuelle, cet élan d’amour, se fraie un chemin.

Dans nos familles dont étaient issus les soldats de la « Guerre 14 » on ne compte pas les récits d’entraide, de fraternité, d’encouragement dans l’épreuve endurée. On ne compte pas les récits de sacrifice de soi-même pour la Patrie et pour parfois sauver un camarade de combat. Cela le Seigneur le sait !

Dès lors, la seule question que nous pouvons nous poser n’est-elle pas celle-ci :

Et moi, et nous, à quoi sommes-nous appelés là où nous sommes dans cette Europe d’aujourd’hui officiellement en paix et pourtant marquée par l’horreur du terrorisme ?

Quelle est notre élan du cœur ?

Quel est notre dévouement pour les autres ?

Que nous faut-il pour incarner la fraternité ?

Matthieu (Mt 25,31-40) :

ce passage évangélique est lui aussi célèbre entre tous car il nous rapporte une scène tellement imagée qu’elle figure sur nombre de tympans de nos cathédrales et basiliques en France :

le Jugement dernier.

Mais,  elle nous dépeint fondamentalement la rencontre du Christ ici-bas sous les traits de l’homme défiguré car ses besoins vitaux ne sont pas assurés : il a faim et soif, il est malade, étranger obligé de fuir sa propre patrie, il est prisonnier pour toutes sortes de raisons… Soldats et civils se retrouvent dans cette précarité dans les guerres d’hier et d’aujourd’hui. Beaucoup alors se demandent : mais où est Dieu ? D’autres dans ces situations horribles comme dans les temps du bonheur n’ont en tête que le service de l’autre, du prochain comme on dit dans la Bible. Ce qui nous est révélé et qui reste pour la foi chrétienne un essentiel, c’est que le service de l’autre désintéressé, noble, courageux, affirmé est toujours le lieu de notre rencontre du Christ notre frère en humanité et notre Seigneur.

3-En ce jour de commémoration mais aussi dans la situation historique qui est la nôtre actuellement, les chrétiens que nous essayons d’être sont donc invités à la rencontre du Christ présent sous les traits de nos contemporains,

spécialement les plus défigurés.

Dans notre pays nos soldats engagés sur bien des théâtres d’opérations militaires se veulent au service de la paix : nous pensons à eux ; nous prions pour eux. Ils assurent aussi notre sécurité avec constance depuis plusieurs années. Nous leur sommes redevables.

Ensemble, élus, militaires, civils de toutes générations

que cette journée nous engage à un plus haut service de l’autre, des autres en nous appuyant sur notre foi : le Christ nous précède avec les saints. Beaucoup aujourd’hui payent de leur personne et parfois de leur vie pour que le monde goûte une plus grande paix  condition de la croissance, de la justice, de la beauté.

Que l’eucharistie offerte en ce jour nous unisse au

Christ victorieux de la mort après avoir donné sa vie pour le Salut du monde.

Que la communion à laquelle plusieurs d’entre nous vont participer renouvelle en nous le courage, la persévérance dans le don de nous-mêmes. Amen.

 

     Père Stéphane AULARD