Homélie de Pâques 2018

Icône du Christ de la Résurrection relevant Adam & Eve

1-Nous fêtons ce soir (aujourd’hui) la Résurrection du Seigneur Jésus Christ.

C’est la plus grande fête chrétienne !

Beaucoup pensent que c’est Noël parce que cette fête rassemble les familles autour des enfants qui sont l’avenir du monde et c’est vrai. Mais, nous le savons, dans l’itinéraire de salut que le Christ a tracé, si l’on y regarde de près, le mystère pascal est à l’œuvre dès les commencements. Quand cet enfant naît sur la paille, dans un inconfort extrême ; quand, à peine né, il est poursuivi par le pouvoir politique du moment ; quand ses parents doivent s’exiler temporairement dans un autre pays avec Lui pour le mettre à l’abri. Nous le savons donc , dès le commencement de l’Evangile, l’amour est mal aimé et le procès de Jésus Christ s’ouvre instantanément ! Mais, pourtant l’Evangile c’est la bonne nouvelle de Dieu qui vient à notre rencontre : alors pourquoi ?

C’est que frères et sœurs,

le cœur de l’homme aspire à la vérité, à la bonté, à la beauté, bref à l’amour sincère et profond

et pourtant il ne cesse d’hésiter puisqu’en lui et autour de lui des forces contraires l’attirent irrémédiablement. Le cœur de l’homme est compliqué et malade : mon cœur, le vôtre, le nôtre. Comme le rappelle le grand Saint Augustin dans ses Confessions (X, 27, 38) en parlant de sa conversion :

« Tard je t’ai aimée beauté si ancienne et si nouvelle,
tard je t’ai aimée ! Mais quoi, tu étais au-dedans de moi-même, et j’étais, moi, en dehors de moi-même. Et c’était en dehors que je te cherchais. Je me ruais, dans ma laideur, sur la grâce de tes créatures. Tu étais avec moi et je n’étais pas avec toi, retenu loin de toi par ces choses qui ne seraient point si elles n’étaient pas en moi.

Tu m’as appelé et ton cri a forcé ma surdité, tu as brillé, et ton éclat a chassé ma cécité. Tu as exhalé ton parfum, je l’ai respiré, et voici qu’après toi je soupire. Je t’ai goûté et j’ai faim de toi, soif de toi, Tu m’as touché et je brûle d’ardeur pour la paix que tu me donnes. »

Le grand intellectuel cherchait et ne trouvait pas de quoi apaiser son cœur à la  recherche de la beauté et de la vérité… Il errait, se perdait, vivait mal et pourtant il cherchait vraiment.

Nous sommes tous de la trempe de Saint Augustin (354-430) seize siècles après !

Les catéchumènes comme tous ceux et celles qui sont déjà baptisés.

2-Ce soir (aujourd’hui) c’est la fête des nouveaux baptisés comme des autres chrétiens de longue date ou plus récemment.

C’est la fête sans frontière des baptisés du monde entier

qui ont décidé de s’appuyer sur le Christ et de le suivre véritablement.

Dans ces temps incertains que nous traversons pour beaucoup de chrétiens non seulement au Moyen Orient mais aussi ailleurs, il est bon que nous nous « retrempions » dans les eaux baptismales qui vont nous revigorer. Il ne s’agit pas d’une parenthèse comme d’une fête arrosée sans lendemain ou d’un mouvement de foule qui panique et éprouve le besoin de se « serrer les coudes » malgré tout.

Notre liturgie pascale exprime en modèle réduit ce qu’est toute notre vie et c’est d’ailleurs pour cette raison que notre vie est sacrée. Nous rappelons dans la liturgie du baptême comme dans les lectures bibliques une seule chose : nous pourrions nous noyer, perdre pied, être engloutis par le mal qui rôde, les peurs qui nous étreignent, les enfermements de toute sorte, les addictions multiples si nous étions livrés à nous-même et sans boussole. Mais, Dieu a fait irruption dans l’histoire d’Israël puis dans la grande histoire de toute l’humanité avec Jésus Christ et Il nous a sortis de la noyade : nous ne serons pas engloutis, non jamais, et avec le psalmiste nous pourrons toujours chanter :

« Tu as changé mon deuil en une danse,

mes habits funèbres en parure de joie ! » (Psaume 29,12)

 

Ce n’est pas pour rien que le baptême est célébré avec de l’eau  et que son modèle est l’immersion et la sortie à l’air libre qui fait reprendre souffle car, dans le baptême, nous est promis que l’immersion et la noyade, le mal qui nous ronge et l’amour blessé n’auront pas le dernier mot.

 

3-C’est une promesse, mais  c’est aussi notre responsabilité bien sûr !

Regardez ce million de personnes sorties dans la rue aux Etats Unis la semaine dernière

pour dire non aux armes en vente libre :

j’aime à croire que ce désir de renoncer au pouvoir de tuer  sans entrave est un signe de l’Esprit qui travaille les cœurs.

Regardez le colonel Arnaud Beltrame au même moment

qui s’est livré  en sacrifice pour qu’une vie soit sauvée sans regarder à la sienne :

ce chrétien qui, à 33 ans avait vécu sa première communion et sa confirmation nous touche bien entendu mais il nous entraîne aussi. Ne  nous rappelle-t-il pas que le dynamisme pascal, le « moteur pascal », si je puis oser ce mot, est à l’œuvre de par la volonté de Dieu qui sans cesse veut nous fait passer des ténèbres à la lumière, de l’horreur au sublime, du péché à la grâce. Et notre Seigneur Jésus Christ par sa vie, ses paroles, ses actes de guérison et de salut tout en éradiquant par son sacrifice le mal absolu nous invite à entrer dans le cortège des saints et des saintes, des gens ordinaires qui misent tout sur Lui. Parce que Lui ne déçoit pas, Lui est notre secret, Lui est notre ami, Lui ne nous écarte pas de notre prochain au contraire puisqu’il nous invite à ne jamais en avoir peur et aussi à nous porter à son secours si cela se présente.

La bonne nouvelle de la Résurrection est un tombeau ouvert : car la résurrection du Christ ne saurait nous faire oublier ses blessures et sa mort, mais le combat est terminé, le passage est accompli, la vie divine est victorieuse.

C’est là notre foi : arrimons-nous-y ! Ne lâchons jamais le Christ pour mieux aller à la rencontre de ceux qui ne nous ressemblent pas dont nous pourrions avoir peur. Le dynamisme pascal c’est tout à la fois, la peine, la souffrance, la mort consentie comme un don de soi et non comme une fatalité, la victoire de l’amour qui ne se paye pas de mots : la résurrection contre l’oubli, le mépris, la terreur au ventre.

 

Oui, soyons des dignes fils et filles du Dieu vivant qui donnent à voir la joie de la résurrection partout où nos pas nous mènent car le Ressuscité ne saurait être absent d’aucun lieu, d’aucun débat politique, bioéthique, sociétal et spirituel bien sûr !

Il est au milieu de nous ce soir (aujourd’hui) comme Il nous l’a promis !

Il est au cœur des jeunes baptisés : ces néophytes autrement-dit ces jeunes pousses qui nous indiquent un renouveau, le printemps pascal, l’espérance absolument car elle vient de Dieu pour passer dans le cœur des hommes!

Amen.

 

 

Père Stéphane AULARD