Homélie Dimanche 28 novembre 2021 – Premier dimanche de l’Avent

Luc 21, 25-28.34-3

En ce temps-là, Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées et désemparées par le fracas de la mer et des flots. Les hommes mourront de peur dans l’attente de ce qui doit arriver au monde, car les puissances des cieux seront ébranlées. Alors, on verra le Fils de l’homme venir dans une nuée, avec puissance et grande gloire. Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête, car votre rédemption approche. Tenez-vous sur vos gardes, de crainte que votre cœur ne s’alourdisse dans les beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie, et que ce jour-là ne tombe sur vous à l’improviste comme un filet ; il s’abattra, en effet, sur tous les habitants de la terre entière. Restez éveillés et priez en tout temps : ainsi vous aurez la force d’échapper à tout ce qui doit arriver, et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme. »

Chers Frères et Sœurs,

Avec l’Eglise, nous entrons aujourd’hui, premier dimanche de l’Avent, dans une nouvelle année liturgique. Année liturgique qui commence plus tôt que l’année civile. Au-delà d’une caractéristique de calendrier, peut-être y verrons-nous aussi le signe que l’Eglise se révèle souvent comme un témoin avant-coureur de ce qui survient dans la société des hommes.

Comment recevons-nous l’Evangile de ce dimanche ? Y voyons-nous une description apocalyptique de phénomènes lointains, passés ou futurs, qui ne nous concerneraient pas directement ? A l’inverse, éprouverons-nous, comme certains, une frayeur maladive à l’annonce des signes extraordinaires dont parle Jésus : troubles cosmiques, confusion des nations, incontrôlable fracassement des mers et des océans ? Reconnaissons-le, beaucoup de ces situations terrifiantes dont parle l’Evangile évoquent ce qu’affronte notre monde aujourd’hui : catastrophes naturelles de grande ampleur, profonds dérèglements climatiques présents et à venir, prolifération d’actions terroristes, cela dans un monde qui semble avoir perdu ses repères spirituels et vivrait sans but. Comme si nous connaissions un Black Friday existentiel où ce qui avait encore du prix autrefois, n’en a plus aujourd’hui, ne vaudrait presque plus rien.

On comprend alors qu’un tel monde soit à l’origine de comportements de fuite, d’une culture de l’évasion et de morbides replis sur soi. Ainsi le cœur de beaucoup s’alourdit-il, certains s’abandonnant sans frein aux beuveries, à l’ivresse et à l’oubli que favorise l’usage de toutes sortes de drogues, comme la fixation obsessionnelle et convulsive à des écrans d’ordinateurs ou de téléphones. A trop fixer l’écran, on tombe dans un filet, à l’improviste.

Face à ces dérèglements, Jésus nous parle de sa venue à nous aussi, disciples de ce temps. L’espérance qu’il promet surpasse les chaos programmés : le Fils de l’homme viendra dans une nuée, lieu où se révèle la présence divine en même temps qu’elle s’y cache. Les puissances des cieux seront ébranlées, mais plus fortes encore se révèleront la gloire et la puissance du Fils de l’homme. Jésus invite les disciples, et avec eux nous-mêmes, à ce que le relèvement ne se produise pas sans nous : Redressez-vous et relevez la tête, dit-il, relevez la tête de vos écrans, car votre

rédemption approche. Restez éveillés et priez en tout temps pour tenir debout devant le Fils de l’homme.

C’est ainsi que dans cet univers très menacé, Jésus nous invite à secrètement prononcer son nom. Nous, disciples d’aujourd’hui, ne craignons pas de prononcer le nom de Jésus sur tout ce qui nous entoure, la nature d’abord : les pierres et les arbres, les fleurs et les fruits, la montagne et la mer, et même les animaux : Jésus n’a-t-il pas déclaré qu’aucun passereau ne sera oublié du Père (Mt 10, 29) ?

Mais plus encore sur nos frères et sœurs, les hommes et les femmes, ne craignons pas d’appeler le Seigneur. En invoquant le nom de Jésus, nous participons au salut du monde et à la transfiguration des hommes. Nous contribuons à restaurer la part divine qui demeure en chacun. Tous ces gens ordinaires que nous croisons dans la rue, le métro et à notre travail, jusqu’à ceux qui suscitent en nous irritation ou antipathie, allons à leur rencontre, en portant le nom de Jésus dans le cœur et, quand on le peut, sur les lèvres.

En prononçant silencieusement ce nom sur eux, nous appelons Jésus emprisonné au cœur de tout homme et de toute femme pour le libérer, fussent-ils criminels ou prostituées. En libérant Jésus en eux, alors nous recevrons avec eux la force d’échapper à ce qui doit arriver pour nous tenir debout, nous aussi, devant le Fils de l’homme. Nous sortirons d’un mode de vie résigné et routinier, en alimentant au long de ce temps de l’Avent des espérances et des rêves pour un avenir nouveau.

Écoutons le pape François qui nous dit : Prier, attendre Jésus, s’ouvrir aux autres, être vigilants, ne pas rester fermés sur nous-mêmes. Car si nous pensons à Noël dans un climat de consommation, à voir ce que je peux acheter pour faire ceci ou cela, de fête mondaine, alors Jésus passera et nous ne le trouverons pas.

Prions, que l’Esprit Saint nous donne la force d’échapper à ce qui doit arriver, et tenir debout devant le Fils de l’homme

Amen
P. Marc.